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Tibhirine, le 10 janvier 2025

Chers parents, amis, frères et sœurs de la communauté : bonjour

Je viens vous rejoindre par cette lettre annuelle et vous redire mon amitié.

J’espère que vous allez bien.

Je vous envoie quelques nouvelles : en texte et en photos ! 

Notre fraternité à Tibhirine se compose à nouveau de 5 personnes : Yves, félicité, Brigitte, Clémence, et Eugène. Clémence est arrivée en février à la suite de Stéphanie, partie en France pour terminer ses études de théologie. Sœur consacrée dans la communauté, elle baisse bien la moyenne d’âge de notre fraternité avec ses 34 ans.

Eugène, Brigitte, Clémence, Félicité et Yves

Bruno Vuillaume, prêtre de la communauté, longtemps présent ici, a choisi d’aller plus vers le sud Algérien et de soutenir la petite communauté chrétienne qui est à El Menia (anciennement El Golea). C’est là qu’est enterré Charles de Foucauld.

L’activité principale du monastère demeure l’accueil des visiteurs, cinq jours par semaine. Leur nombre ne baisse pas, il semble plutôt augmenter. La taille des groupes que l’on accueille varie de 2 à 30 personnes. Certains samedis ils sont une centaine. La plupart sont algériens musulmans. Ils sont très bienveillants à l’égard du monastère et de son histoire, et on a souvent de belles rencontres avec eux.     

Groupe de collégiens venus visiter le monastère

 

On accueille aussi des personnes qui viennent passer deux-trois jours jusqu’à une semaine. Il y a des parents, des amis. Aussi des chrétiens religieux ou laïcs qui viennent faire une retraite de silence, de solitude et de prière. Ce qui est un peu nouveau c’est la demande de musulmans qui viennent prendre ici un temps de silence et de prière. Surtout des femmes.

Cette année il y a eu autour de 180 personnes qui ont passées au moins une nuit au monastère.

Des membres de la communauté ou de la communion du chemin neuf de France viennent nous aider chaque année en passant avec nous 3 à 4 semaines. Des couples et des célibataires. Ca nous soutient beaucoup. Ce qui reste difficile pour venir en Algérie est l’obtention du visa. Il est accordé à certains, refusé à d’autres.

Sur le plan politique la vie est calme en Algérie. Le président a été réélu en septembre pour un nouveau mandat. Ce qui est un peu désolant ce sont les relations entre les gouvernements algériens et français avec des hauts et des bas. Depuis deux ou trois ans ce sont surtout des bas. Ça se ressent aussi dans l’obtention des visas. Alors qu’on aurait tant à gagner, pas seulement sur le plan économique, à être davantage ensembles.

On porte cela dans notre prière. Mais dans les relations personnelles, en tant que Français, nous sommes bien reçus. L’hospitalité est une des richesses des habitants de ce pays.

Coté travaux ce devait être une année calme, mais cet été un chantier nous est tombé dessus, après la découverte que le plafond de la salle à manger s’affaissait sérieusement. Grace à une bonne entreprise qui nous est fidèle, on a refait le plafond et aussi l’éclairage et la peinture de toute la salle. Maintenant c’est beau, et on n’a pas à craindre que le ciel ne nous tombe sur la tête !

 Réfection du plafond de la salle à manger

Sur le plan personnel ça va. 73 ans. Physiquement pas de gros travaux en vue.  La santé tient, avec quelques comprimés avalés chaque matin. Je m’active bien et si je souffle dans les côtes, cela fait partie maintenant du paysage. Cet été j’ai passé une semaine de vacances à Bejaia (Bougie), belle ville portuaire en bord de mer. Je suis dans ma huitième année ici en Algérie. Le temps passe vite.

Une belle joie en cette fin d’année : la restauration de la statue de Marie en haut de la colline qui surplombe le monastère. Cette statue avait été posée par les moines en 1939, un an après leur arrivée à Tibhirine. En haut de la colline elle regarde toute notre vallée et bien au-delà. On la voit depuis le monastère. Un ami du village, qui le matin part en moto à son travail, me disait que, quand il la voyait le matin, savait que sa journée se passerait bien. Abimée par l’usure du temps, mais aussi par un déséquilibré, qui en 1975 avait essayé de la casser, elle était restée abimée et continuait à se détériorer. On a cherché longtemps quelqu’un pour la restaurer, et après six ans, la Providence nous a envoyé une jeune femme algérienne, professeur à l’école des beaux-arts d’Oran, spécialiste justement en restauration de statue. Amel, musulmane pratiquante, s’est vraiment appliquée dans cette restauration et le résultat est très bon. Marie a retrouvé sa Grace, faite de douceur et de beauté.

         

Avant la restauration                    Mise en place de l’échafaudage        

                

                      Amel appliquée

 

Une autre de nos joies en cette fin d’année a été la nomination de notre évêque, Jean-Paul Vesco, comme cardinal. Joie pour la petite Eglise d’Algérie et ses amis.
Mgr Jean-Paul Vesco et le pape François

Cette dernière semaine j’ai eu la chance de pouvoir aller faire une retraite de silence et de prière à Beni Abès dans le sud-ouest Algérien. C’est là que saint Charles de Foucauld a établi son premier ermitage en 1901 et y resté 3 ans. Actuellement ce sont deux religieux qui y habitent et assurent l’accueil : un spiritain et un capucin.

C’est un très bel endroit et on y sent encore bien le passage de Charles de Foucauld. Un peu loin de Tibhirine pour faire une retraite : 17 heures de bus, mais c’était super !

      

Oasis de Beni Abès                                                                                                       Ermitage

 

Chapelle avec le sacré cœur peint par Charles de Foucauld

J’ai été très touché par la dernière encyclique du pape François sur le cœur de Jésus : « Dilexit nos » (Il nous a aimés). Je trouve la première partie sur « l’importance du cœur » particulièrement actuelle.     

Le cœur de Jésus est mystérieusement lié à ma vocation de prêtre : « appelé pour être proche de son cœur. »

Dans cet écrit je retrouve l’importance donné au cœur dans la vie : « à une heure où la société mondiale est en train de perdre son cœur…rien de valable ne se construit sans le cœur. ». Ce monde a un cœur, c’est celui du Christ. Qu’avec Lui, et avec tous, nos cœurs continuent à battre.               

Toutes mes amitiés en ce début d’année.

Que Dieu vous bénisse et qu’il vous montre son visage. Merci aussi de prier pour nous.

Bien fraternellement .  Eugène           

                                                                                                                                                           

Tibhirine, 9 septembre 2024

Bonjour,

Aujourd'hui se termine chez nous la retraite ignatienne des pères et soeurs blancs.

Dans 15 jours, nous accueillerons la retraite des prêtres diocésains autour de leurs évêques.

Quelques gouttes d'eau sont tombées hier et avant-hier ici. Sinon temps très sec et chaud. ... Les récoltes sont correctes.

Inondations dans le Sud : les sœurs d'Ain Sefra ont dû être évacuées en urgence et leur matériel pour les handicapés risque d'avoir beaucoup souffert.

En ce moment à Tibhirine, pas trop de visiteurs, mais toujours de belles rencontres !

Bonne rentrée à vous dans un climat politique difficile : que Marie, N D de Tibhirine, nous protège !

Fr yves

 

Tibhirine le 27 juin 2024 - AG de l'Association des Ecrits des 7 

Bonjour à tous, 

Je suis heureux de vous donner quelques nouvelles de notre Communauté à Tibhirine !

1/ la Communauté du Chemin Neuf à Tibhirine

Depuis l’an dernier, quelques mouvements !

Sont toujours présents :

- P Eugène prêtre et responsable de notre Communauté. Il gère l’entretien des bâtiments et participe à l’accueil des visiteurs.

- Sr Félicité responsable du jardin et donc des confitures ! Elle en a produit 12 000 pots en 2023, selon une méthode artisanale. Confitures toujours appréciées par nos visiteurs et ce chiffre montre que, malgré la sécheresse nous avons eu des productions records de figues et de prunes l’an dernier.

- La Production de pommes a été moyenne : c’est ce secteur qui souffre le plus de la sécheresse et nous avons arraché quelques hectares qui produisaient trop peu par rapport au travail et à l’arrosage fourni.

Nous sommes à notre 5ème année de sécheresse, donc sans véritables pluies, mais les quelques pluies reçues, tombaient lentement et la terre a pu en garder une bonne partie. Pas de neige sauf quelques flocons un samedi qui fondaient avant d’arriver au sol.

Nous sentons la terre en souffrance et de grands cèdres sèchent sur pied.

Depuis 5 jours, la source principale a fortement diminué et nous laissons toute l’eau pour le village en branchant le monastère sur le forage… Sa capacité supportera-t-elle le verger et la maison, c’est la question… Pour les pommiers, il y a encore 2 mois et demi à tenir. Mais le Seigneur ne comble-t-il pas les affamés ? Confiance donc en celui qui n’oublie ni les oiseaux du ciel ni les lys des champs.

Je reviens à la Communauté :

-moi-même Fr Yves: j'occupe une bonne partie de mon temps à recevoir les visiteurs et participe avec les autres aux services communs : liturgie, cuisine, nettoyage, arrosage, entretien du cimetière et des jardins – les chardons semblent bien résister à la sécheresse !! –

-Sr Brigitte nous encourage par la prière, car elle est en France depuis plusieurs mois pour raison de santé et devrait revenir courant septembre. Elle en a grand désir…

-Sr Stéphanie nous a quitté l’été dernier pour commencer ses études de théologie à Lyon. Elle entretient son parler algérien avec les étudiants qu’elle rencontre à la Fac.

-Fr Bruno a rejoint Marseille où il continue sa formation et il nous rejoint 1 mois par trimestre.

- Nous est arrivée en Février, Sr Clémence qui s’est très vite insérée dans la Communauté et dans le pays. Elle s’était déjà mise à l’arabe algérien pendant l’attente de son visa et, avec ses 34 ans, elle rajeunit l’ensemble pour notre bien à tous ! Maitresse de maison, elle veille à notre bien fraternel, accueille les retraitants et participe aux visites.

- Bien sûr nous n’oublions pas les fidèles Youcef et Samir toujours parties prenantes de la vie du monastère. Quelques jeunes voisins aident occasionnellement pour les cueillettes, les arrosages ou les désherbages.

2/ Nos visiteurs :

Ils sont peut-être un peu moins nombreux, notamment durant la canicule de l’été dernier et la chaleur actuelle. Les groupes ont un peu diminué en nombre et en nombre de participants. Effet du mois de Ramadan lors de la période favorable du printemps ? Une certaine augmentation des algériens de l’étranger, toujours touchés de notre présence et de la qualité de l’accueil. Ces visites sont toujours l’occasion de beaux échanges.

Notre difficulté à proposer la visite en arabe parlé algérien nous amène à réaliser actuellement un DVD de visite type qui pourra être utilisé en DVD ou en audio, en tout ou partie chaque fois que nous le sentirons nécessaire. C’est important pour l’accueil des scolaires et des étudiants et se fera toujours avec notre présence physique.

Notons une certaine augmentation des visites de corps diplomatiques et consulaires, qui apprécient un moment de détente loin du tumulte de la grande ville.

Nous ressentons un peu la volonté du pays de s’ouvrir davantage au tourisme par la facilitation des visas via les agences de voyage.

Pour les diplomates et les touristes étrangers, nous proposons de pique-niquer sur place, ce qui permet de proposer la messe et d’avoir des temps d’échanges au-delà du temps de visite classique.

Peu avant l’Aïd et pendant une dizaine de jours, nous avons subi un vacarme infernal 10 à 11h par jour : bulldozers, marteaux-piqueurs, camions : c’était la démolition totale de la mosquée. Le village et nous-mêmes en avons été émus. Une mosquée sera reconstruite plus modeste, mais nul ne sait si c’est à la même place ou ailleurs …

3/ Pour le village, une évolution importante : un château d’eau a été construit sur notre terrain sous la statue de la Vierge Marie. Un forage a approfondi le petit forage existant. Le réseau d’eau a été mis en place dans toutes les maisons sans compteurs avec un découpage qui prévoit 4 secteurs, donc de l’eau tous les 4 jours. Mais le débit et le stockage ne sont pas suffisants et donc ne répondent pas à la demande. Il est question de compteurs pour limiter cette demande. La fontaine au-dessus du monastère est donc encore bien utile et fréquentée jour et nuit en cette période chaude.

Les relations de voisinages avec ceux qui ont connus les moines sont toujours très chaleureuses et leur accueil, lorsque des parents ou des amis passent, est toujours touchant et dévoué.

Avec les autres habitants, plus récemment arrivés, qui n’ont pas connu les moines, les relations sont trop souvent limitées aux demandes d’aides pour des problèmes de santé, pour des difficultés liées au chômage partiel, parfois pour la scolarisation. Nos ressources actuelles étant modestes et un certain devoir de réserve en tant que chrétiens et étrangers, nous ne pouvons entrer dans un projet de soutien scolaire qui serait pourtant bien nécessaire.

4/ Enfin nos relations avec l’église en Algérie, sont toujours très bonnes et s’approfondissent par l’augmentation des rencontres :

  • Accueil des retraites personnelles ou en Communauté
  • Accueil de la retraite annuelle des prêtres et religieux
  • Participation moins difficile aux rencontres diocésaines puisque nous ne faisons plus de visites le vendredi.

Nous nous sentons de plus en plus membres d’un même corps, dans une fraternité vraie et partagée. C’est très important pour chacun de nous.

  • Accueil annuel du pèlerinage des paroissiens du diocèse en Mai
  • Tout récemment et pour la deuxième année consécutive, rencontre à Tibhirine avec les collaborateurs et collaboratrices musulmans des centres d’activités du diocèse et les amis du diocèse : nous étions plus de 80 et ce fut très beau et très cordial, dans ce cadre qui aide tant au dialogue et au partage. Un temps fort a été le témoignage de notre voisin Mohammed qui a dit son vécu de plus de 12 ans avec les moines : temps fort parce que très concret.

Fr Yves - Tibhirine

( N.B. : Concernant la pièce ‘’ l’ami de la dernière minute’’, qui se jouera dans quelques jours à ND d'Afrique, je peux témoigner que nos avons reçu pendant 4 jours l’été dernier cette troupe qui était encore en recherche dans ses textes, ses rôles, mais qui déjà avait senti la nécessité de vivre un temps fort ensemble loin de la ville et de l’activité journalière. Nous étions autorisés chaque soir à vivre le récapitulatif de la journée et nous avons été touchés de la fraternité, la délicatesse qui s’étaient installées entre eux. Nous sentions qu’un beau fruit se préparait.)

 

 

 

 

Pour en savoir plus :